Un appel à l'autre
L'amour, je l'ai cherché pendant des mois, accolées en années. Celui, le seul et l’unique, qui vous faire peur chaque matin au réveil, en regardant sur le traversin, juste pour voir si votre ange est toujours là, s’il ne s’est pas volatilisé dans la nuit…
Je l’ai cherché dans des yeux, au hasard d'une rue, dans la certitude d’une amie, l’échange de ce regard qui ne venait jamais... ce regard qui semblait éternel…
Sur des filles jolies et gentilles, au lycée, sur des filles jolies et pas très gentilles, sur des filles impulsives, sur d’autres rebelles, sur des jolies professeurs de collège, des filles calmes, caractérielles, sur une poitrine, sur des filles gentilles et pas très jolies, , à la fac des filles minces, sur des filles rondes ou athlétiques, sur une fille accostée dans un bar, sur un sourire, parfois sur les copines de mes copines, sur des blondes ou des brunes, des rousses aux yeux bleus, sur des filles timides, d’autres arrogantes, sur des allumeuses, des garçons manqués, sur des actrices ou des mannequins, sur du papier glacé…
Un seule seconde de partage suffisait alors pour comprendre, que ça durerait un mois maximum… ou peut-être deux avec un peu de volonté… rien de bien passionnant, au fond, pour qui n’aime de la douleur, l’offrir un temps, ou bien la recevoir, souvent plus longtemps encore...
Les intempéries, les orages, le soleil ou le printemps sont bien souvent assassins pour les fleurs à teintes bleutées, fragiles et exigeantes, tout à la fois…
Pourtant bien rêveur et un peu dans le coton, je n'ai cessé d'y croire, croire qu'un jour, cette rencontre unique et sublime puisse venir à moi, je n'ai cessé de croire à cette étoile, que tant de gens vous promettent, vous racontant pêle-mêle leurs histoires au travers de clins d’œil intarissables. Parlant de cet amour qui ne se délabre pas avec le temps, pour ne pas dire qui se désagrège semaine après semaine, ou jour après jour comme une bougie qui se consume, ne laissant rapidement que quelques coulées de cire sur la table du salon…. A côté d’un petit mot d’adieu, rédigé à la va-vite dans un déménagement tout aussi impulsif. Agrémenté d’une goutte d’eau savamment déposée sur les écrits, pour vous faire croire en vain à une quelconque tristesse, orchestrée seulement par les remords que cette situation induit.
Et puis, arrive enfin l’impensable, le jour où certainement on s’y attend le moins… Un phénomène irréel, un truc qui tombe comme ça, une personne que l’on a toujours connue, sans rien savoir d’elle, que l’on a toujours serré très fort dans ses bras, sans même l’avoir touché… Scotché là, devant le téléphone, penser et repenser à cette magie qui vous traverse d’un coup chaque partie du corps, par enchantement.
°°° Je l’appelle, non ça fait trop amoureux. J’attends qu’elle m’appelle. Non ça fait trop besogneux… alors je l’appelle dans 5 mn, oufff non non non… Allez appelle-moi,… la besogneuse… Oui mais si elle m’appelle, je réponds ?? ça fait un peu trop disponible, non… rhalala. Bon, non m’appelle pas… !!! C’est moi qui appelle, oui mais si jamais je tombe sur la messagerie, faut que je prépare un truc, sinon je vais dire à peu près n’importe quoi. Ou alors je raccroche avant le bip… oui mais elle va voir l’appel en absence, et moi j’ai même pas laissé un petit mot, non.. pas bien. Et si jamais elle ne répond pas parce qu’elle ne veut pas me parler. Pire si elle répond, je fais quoi là : … Alors ça va toi, fait beau aujourd’hui.. ça te dit d’aller au ciné…, snif… °°°
Une évidence emplie de doute, qui vous fait soudainement bondir de votre rêve, le sourire au lèvres… les lèvres sur la bouche, un mot sur la langue… la bouche en cœur, et tout le reste en déroute. Une angoisse qui monte en vous. Le téléphone sonne… ahhhhhhhhhh, horreur…
« Allo ??
Iep, c’est olive, bon qu’est-ce tu branles ce soir , j’ai taupé le peuch5, tu viens taquiner la ballon ?
Ahhhhh, c’est toi, snif… euh bein ce soir, je sais pas, j’passe demain, ça roule…,
Blah, blah, blah…
Faut que je te laisse, j’attends un appel important…, snif… »
Allez merde, je l’appelle, et puis on verra après tout :
« Coucou, ça va, j’osais pas t’appeler, je suis devant le téléphone depuis des heures.. et je me pose un milliard de questions…
Oui moi aussi, je regardais mon portable….
Tu me manques…. Tu me manques beaucoup… »
L’appréhension de l’autre, qui se dévoile peu à peu, comme on entrouvre un coffre au trésor, d’où jaillit une lumière étincelante et aveuglante, allant de surprise en pièces d’or, de richesse en étonnement. Un émerveillement. Le regard d’un enfant dans une boîte qui cache mille intrigues et secrets à parcourir et découvrir… Une aventure sans fin, une dimension étrangère, une étendue sauvage, une vie devant soi, de curiosité et d’apprentissage de l’autre.
Les premières disputes, un rien aphrodisiaque… Une montée d’adrénaline.
Les points communs qui se construisent, les compromis qui se déguisent, l’avenir qui s’éclaircie, le présent qui s’adoucit.. passé brusquement du coton rêveur à la plume apaisante.
Une plume funambule qui vous frôle le visage dans les gestes fluides et harmonieux d’un acrobate en suspend sur son fil.
Le contact, le toucher qui se développe et s’accroît, lentement mais sûrement, de bisous, en caresses, de caresses en attouchements, d’attouchements en évanescence.
L’absence qui devient insupportable… le manque angoissant qui s’installe alors les premiers temps… et puis les premiers temps qui durent et qui durent… l’absence qui reste insupportable, le manque angoissant qui persiste…
Une puissance qui se crée en vous, une énergie jusqu’alors indécelable, maintenant près à démolir tous les obstacles qui obstrue votre passage… en force… rien ne vous arrêtera, sauf peut-être sa présence.
Juste une présence qui vous fait oublier tout ce que la vie à manquer de vous donner, par le passé, alors même que vous n’en espériez pas temps.
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